J'appartiens
à cette génération d'Africains qu'on nomme «génération
intermédiaire», celle qui avait moins de 15 ans au moment des
indépendances des pays africains. Nous étions assez grands pour
connaître, comprendre et même admirer ceux que nous avons accepté
d'appeler «les pères des indépendances»: Ben Bella, Bourguiba,
Nasser, Senghor, Sékou Touré, Houphouët-Boigny, Nkrumah, Olympio,
Lumumba, Kenyatta, Modibo Kéita, Mandela et...les autres. Cependant
nous n'étions pas assez «mûrs» pour participer aux luttes contre
le colonisateur, autrefois esclavagiste.
Notre
génération a accédé ensuite au pouvoir après avoir tué, au sens
vrai ou figuré, ces premiers leaders.
Qu'en
a-t-elle fait, de ce pouvoir conquis dans la violence, souvent avec
l'aide du colonisateur que nos pères croyaient avoir mis dehors,
mais qui a utilisé les nouveaux venus pour régler leurs comptes à
ceux qui avaient osé les braver pour libérer leurs pays?
Incapables
de montrer le chemin de la liberté si chèrement conquise,
incapables de guider leurs peuples vers le développement, les
nouveaux maîtres du pouvoir politique sont pratiquement tous
devenus, peu ou prou, des dictateurs, des suceurs du sang de leurs
propres frères et sœurs.
Découragée,
désespérée, affamée, la génération suivante, celle qui est
arrivée après la mienne, a purement et simplement déserté le
combat pour la liberté. Par lâcheté, par pur égoïsme et par
appât du gain et de l'enrichissement facile et rapide, elle a cru
n'avoir plus que le choix entre:
- émigrer quoi qu'il arrive et quel qu'en soit le prix à payer: beaucoup ont disparu pendant cette macabre «transhumance»; la plupart de ceux qui sont parvenus à «l'eldorado rêvé» traînent leur misère dans les villes européennes ou américaines, bardés de diplômes universitaires et même de thèses, mais obligés d'accepter pour quelques euros, des boulots de sous-hommes: éboueurs, gardiens d'immeubles, membres d'organismes de sécurité privée... surexploités, mal logés, poursuivis par la police...
- se transformer en bandits de grands chemins: coupeurs de routes, racketteurs, preneurs d'otages, pirates des mers, trafiquants en tous genres, chefs de guerre, assassins...
Au
besoin, ils espèrent ennoblir leurs crimes en invoquant la «guerre
sainte», le djihad, en appelant l'islam au secours, alors que ce
faisant, ils trahissent allègrement le prophète, le Coran, la
Sunna...
L'Afrique
est à la croisée des chemins: c'est le moment pour la jeune
génération de se ressaisir, de reprendre le chemin de la
conscience et de se mettre au travail pour délivrer le continent,
faute de quoi, il sombrera définitivement, corps et biens.
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